Que faire avec une émotion? C’est une question simple en apparence, mais devant laquelle nous pouvons nous sentir démunis. En effet, la gestion des émotions ne fait souvent pas partie de notre éducation familiale, et encore moins de notre cursus scolaire.
Pourtant, les émotions font partie de notre vie quotidienne, mais elles appartiennent au monde de l’irrationnel et de l’intangible, au point où nous pouvons les percevoir comme un phénomène mystérieux qui fait peur. Devant cette force un peu incontrôlable qui nous envahit parfois, nous pouvons nous sentir désemparés et être tentés de mettre en place des mécanismes d’évitement, de répression ou de mise à distance : se changer les idées à outrance ou se lancer dans des occupations exagérées, consommer, rationaliser, procrastiner, etc.
Par ailleurs, nous pouvons être tentés de catégoriser les émotions comme bonnes (joie, surprise) ou mauvaises (colère, peur, tristesse, dégoût), ce qui peut nous amener à refuser certains ressentis plus difficiles. Nous pouvons illustrer ces mécanismes par une métaphore, soit un barrage que l’on mettrait en place pour entraver la circulation d’un cours d’eau. La pression qui en découlerait pourrait devenir envahissante, difficilement supportable et entraîner des problématiques telles que des maux physiques ou de l’anxiété.
Pourtant, les émotions sont toutes légitimes et porteuses de messages importants sur nos besoins qu’il nous faut apprendre à décoder. Voici donc comment apprendre à écouter une émotion par le processus de gestion émotionnel (selon Garneau et Larivey) :
1. Émergence : j’accepte de ressentir l’émotion. Je m’arrête, je respire, je porte attention à ce qui se passe en moi. Je suis dans l’ouverture à mon expérience et j’essaie d’observer simplement sans juger.
2. Immersion : je reste dans l’émotion, je la laisse me traverser et je l’identifie.
3. Développement : accepter la confusion ou le fait de ne pas comprendre. Laisser monter les images qui viennent et les souvenirs du passé qui peuvent être associés à l’émotion.
4. Prise de signification : je donne un sens à mon ressenti en prenant conscience des besoins sous l’émotion. Par exemple, sous mon ressenti de colère, je peux avoir besoin d’être considéré, reconnu, écouté, respecté, etc.
5. Action unifiante : je prends la responsabilité de répondre au besoin identifié en posant une action ou en le nommant à mon entourage.
6. Pré-émergence : je me sens apaisé puisque j’ai intégré mon expérience. Je suis disponible pour recommencer le processus avec une autre émotion.
Ce processus peut sembler complexe à première vue, mais devient vraiment naturel avec la pratique. On pourrait par ailleurs craindre que l’émotion nous envahisse si on lui laisse une telle place, mais c’est en fait le contraire : tout comme une vague de l’océan, l’émotion qu’on laisse circuler est passagère et finit par s’estomper.
Référence : Garneau, J., Larivey, M., & La Plante, G. (2000). Les émotions: source de vie. ReD éd.
Emmanuelle Chaput
Psychologue